Hôpital d’Orsay
A la reconquête des libertés de mon corps
Samedi 3 février
Une nuit entamée tôt, vers 21 :00, avec deux gros trous de 1 heure ou plus vers minuit et 4h30, et me voilà réveillé à 6 :58 par l’envie d’aller aux toilettes. Le lit motorisé m’aide à me lever : le plus dur est de basculer la jambe droite en-dehors du lit, mais finalement, ca se passe bien.
Je reviens dans mon lit et me rendort un peu.
8 :00 : Je suis bien réveillé. Mon fauteuil est en face de mon lit, mais ce n’est pas bonne place : il faut le déplacer près du lit. Est-ce que je vais y parvenir ? Je vais essayer. J’enfile mon déambulateur de compétition et je vais au fauteuil. Aucune roue n’est bloquée et c’est un jeu d’enfant de le déplacer au bon endroit.
Je m‘y installe et je commence la lecture des SMS, des messages pro, des messages personnels.
8 :45 : Le petit déjeuner arrive. Thé + pain + miel.
9 :15 : Le médecin passe, un grand jeune homme noir. Il confirme l’indication de me laisser sortir demain dimanche donnée par son collègue hier matin. Je croyais vraiment avoir compris hier matin qu’il me laisserait sortir aujourd’hui samedi, mais l’infirmière semble sûre d’elle. Ca sera donc demain dimanche.
10 :00 : Je décide de faire le tour du noyau central du bâtiment avec le déambulateur. Je suis bien plus efficace qu’hier. J’aurais pu le faire d’une seule traite si nous n’avions pas tapé la discute avec une patiente en chaise roulante. Motarde comme moi, mais avec une particularité rarissime : elle ne ressent jamais la douleur ! Ainsi sa double fracture du tibia et du péroné qui ne lui a jamais fait mal.
De retour dans mon fauteuil, je relève le compteur : 126 « pas ».
10 :30 : le kiné fait sa tournée. Il m’accompagne avec les béquilles. Ca n’a rien à voir avec hier : je vole littéralement au-dessus du sol : c’est beau !. Je m’entraine dans les 4 marches d’escalier entre les bâtiments, tout seul, montée et descente. Du coup, le kiné repart avec le déambulateur : cet instrument n’est déjà plus de mon niveau.
11 :00 : la salle de bain est libre à présent. Tout à l’heure, j’ai proposé à l’aide-soignante de prendre ma douche tout seul et de l’appeler au secours si nécessaire. Bien entendu, il me faut la chaise en plastique pour laver les jambes. Je prends tout mon temps : c’est bon.
13 :10 : Je viens de déjeuner, et je sens qu’une petite sieste serait la bienvenue … Je me réveille 1 grosse heure plus tard. Ma camarade d’infortune qui ne sent pas la douleur, motarde aussi, vient me faire un brin de causette au saut du lit. Une vraie louloute de banlieue.
15 :00 : Mon compagnon de chambre reçoit sa femme, qui ne cesse de causer. Elle raconte que René et Marcelle (j’invente …) ont passé toute la journée de samedi dernier à « profiter des soldes chez Decathlon, du matin jusqu’au soir. Ils ont acheté 3 magnifiques manteaux de ski, super-chaud-là tu sais. Des doudounes. A moitié-prix ! »
« Mais ils ne font pas de sport …» lui marmonne le mari affaibli
« Ben non. C’est curieux quand même … Mais tu te souviens que chez eux, y’a des tas de linge sale partout. Il parait qu’ils ne lavent pas le linge ; ils en changent ».
16 :30 : Véronique me rend visite. Je lui montre toute l’étendue de mon autonomie en allant jusqu’au lobby entre les deux bâtiments. Là se trouve un fauteuil, libre : ca tombe à pic. Elle restera 1 petite heure.
20 :30 : Extinction des feux. Le temps se passe de petite sieste en petite promenade et petite lecture dans ce petit périmètre.
Dimanche 4 février
7 :28 : Réveil pour la 4° fois depuis 1 :30. Je me lève. J’aurais quand même dormi plus de 8 heures (11 -3=8 … ca doit être ca). Doucement. Pipi aux toilettes, puis fauteuil, dans le noir qui s’attarde.
J’ai mal partout. L’infirmière passe à 8 :00 et s’étonne de voir que je n’ai pas absorbé mes 3 cachets hier soir, mais juste un Doliprane 500. « Laissez le Contramal de côté si vous voulez, mais prenez quand même le Doliprane ; c’est que ca fait mal une cassure ».
Ah … Bon alors, je comprends mieux.
Je me découvre des douleurs partout, là (les côtes hautes à droite) et là (les côtes basses à gauche).
« C’est normal. C’est comme ca : les douleurs se réveillent petit à petit. C’est pour ca qu’on vous garde un peu ».
8 :15 : Je m’installe pour poser ces quelques notes sur l’écran.
Il faut aussi que je travaille pour DFY : ce matin, c’est un vrai défi !